Peine En Retard - Tumblr Posts

3 years ago

Ma maison

Défi 30 jours pour écrire, sujet : Déménager/si j’étais invisible

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Je déteste déménager.

Normal, me direz-vous. Tout le monde déteste déménager. Mettre sa vie dans des cartons, trier, virer, et s’épuiser à la replacer à peu près dans l’ordre, goutte à goutte, dans un autre endroit, qui pourrait aimer ça ?

Je l’ai fait pourtant, si souvent. Tous les trois ans, à peu près, c’était une habitude avec ma mère. Première année, investir le nouvel endroit. Deuxième année, bougeotte, tous les meubles changent de place au moins une fois. Troisième année, marre, au moins une bonne raison de changeait d’air, et hop, on filait.

Après, ça a été les études, encore pire – j’ai déménagé tous les ans, à par le master 1 où j’ai réussi à rester au même endroit deux ans d’affilés. Puis ça a le retour au pays – un an et demi du petit studio qui m’a servi d’escale le temps de trouver du travail, six mois pour partager un appartement, puis enfin du travail et re-déménagement dans un vrai appartement. Là, têtue comme une bernicle, je suis restée cinq ans accrochée à mes murs, même si j’avais à peine la place de me retourner au milieu de mon bazar. Tous mes livres étaient avec moi, mon cocon était plein comme un œuf, mais je ne voulait pas partir.

Donc maintenant que j’ai une maison et que j’ai péniblement tout casé dedans, non, je ne bouge plus. Je vais vieillir ici, m’y faire pousser des racines si profondes qu’aucun sécateur n’en viendra à bout, lui faire prendre toutes les apparences et la remplir de toutes les décorations les plus farfelues, mais je ne bouge pas. Le monde peut bien s’écrouler, ici c’est chez moi. Je me fous de « réduire la valeur de mon bien » et toutes ces conneries. Je ne la vendrai pas. C’est ma maison et je ne veux plus jamais déménager.

Quand je mourrais, je resterai encore là. Je serai un fantôme invisible et je surveillerai ce qui s’y passe. Je n’embêterai pas les vivants, bien sûr. J’ai été bien accueillie par les fantômes des précédents propriétaires. La maison n’avait connu qu’un couple de propriétaire depuis sa construction, avant nous. Ils l’ont achetée jeunes mariés et y sont restés jusqu’à leur mort. C’est très bien. C’est ce que je planifie de faire aussi.

Je serai sage, mais je serai là. Je jugerai silencieusement la bibliothèque des nouveaux arrivants, je squatterai leur canapé pour regarder la télé, j’allumerai leur console au milieu de la nuit. Ou autre gadget futuriste. J’ai le temps de voir venir.

Et quand l’exorciste qui finira par arriver me demandera ce que je fais encore sur cette terre, je lui expliquerai : c’est ma maison, et je déteste déménager.


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1 year ago

Voyage

Défi d’écriture 30 jours pour écrire, 5 août 

Thème : Vibration/souvenirs d’autres vies

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Le tintement du bois sur le bol tibétain. Juste une note qui résonne jusqu’à l’intérieur d’elle-même. Une vibration.

Elle se concentre. Sur l’instant. Sur son corps.

La note. Vibration.

Elle n’existe plus qu’en une minuscule version d’elle-même, de plus en plus concentrée. Elle devient son souffle à l’intérieur de son corps. Une toute petite molécule d’air à l’intérieur de ce souffle.

Vibration.

Encore plus petit. A l’intérieur de l’intérieur. Jusqu’à

Vib

ce  qu’elle se traverse elle-même, son âme qui se retourne comme un gant, et qui se redéploie de l’autre coté

Tout ce qu’il y a à voir tout ce qu’il y a à découvrir de l’autre coté des autres vies tant d’expériences tant de sensations tant de souvenirs tous ces univers qui sont là qui sont ailleurs qui sont autres comment tout voir tout comprendre tout engranger plus vite plus viteplus vite encore

et c’est trop, déjà la fatigue arrive, toute cette énergie venait d’un autre corps trop lointain, il faut revenir, l’âme qui se recentre et retraverse, revient à la maison

ration

toujours minuscule de retour dans son propre corps, sa propre vie, et peu à peu

Vibration.

la concentration s’affaiblie, laissant la pensée se dilater, s’épanouir, dans tous le souffle, tous les poumons.

La note. Vibration.

Elle revient à elle peu à peu et reprend possession de son corps. Son esprit. Son être uni à nouveau avec elle-même.

A nouveau, le bois tinte sur le bol, laissant flotter dans les airs une nouvelle note, une ultime vibration.

Elle ouvre les yeux.

« C’était rapide. Tu as pu trouver ce que tu voulais ?

Elle s’étire, savourant ce simple geste. Dans sa tête, les souvenirs du voyage menacent de s’effacer, aussi fugaces que des rêves. Si près et si loin à la fois.

­— C’était… instructif. »

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