French writer, écrit de la SFFF et des fanfictions, poste sur l'écriture et reblogue Pratchett
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Chambre 28
Lorsqu’elle parle, je sens la colère qui monte.
Oh, elle est adorable, pourtant. C’est sans doute pour ça. C’est une gentille petite mamie – arrière grand-mère, même – qui ne ferait pas de mal à une mouche. Qui a donné de sa personne toute sa vie. 84 ans, ça en fait des décennies à trimer pour que tout le monde ne manque de rien, ni mari, ni enfant, ni toute la panoplie familiale plus ou moins éloignée, ni les amis, collègues ou voisins. De quoi t’as besoin ? Dis-le-moi et je m’en occupe !
On n’en fait plus des comme elle.
Je ne veux pas dire que sa gentillesse s’est retournée contre elle. Des gens qui ont donné, donné, donné, et qui au crépuscule de leur vie sont entourés et célébrés, il y en a aussi plein. La bonté n’entraine pas de punition.
Mais elle n’entraine pas non plus de récompense. Pas à tous les coups.
Elle me raconte, un peu gênée, honteuse par procuration, tout ce qu’on ne fait pas pour elle. Parce qu’elle est clouée sur un lit d’hôpital et a du mal à marcher. Tous les reproches pour avoir abandonné son mari. Pour être si égoïste qu’elle ne peut pas faire son ménage elle-même.
Tout ce qu’on refuse de lui dire. Parce qu’elle est cardiaque. Elle ne doit pas savoir ce qui se passe dans la famille. Elle ne peut pas voir les photos de ses arrières petites-filles.
Et l’absent. Tout ce temps sans nouvelles de lui. L’incompréhension. Des années sans un coup de fil. Pourquoi ? Qu’a-t-elle fait de mal ? Et s’il lui était arrivé quelque chose de grave ?
Mieux vaut prendre la faute sur elle que de penser au pire.
Le pire, c’est bien sûr que le pire arrive aux autres. Pour elle, le pire c’est de ne plus rien pouvoir faire.
Elle pense à mourir. Souvent. Un moyen de quitter la scène en étant enfin exemptée de tous ces reproches.
Mais elle ne le fera pas elle-même, bien sûr. Elle ne peut pas. Pour eux.
Elle y pense, c’est tout.
Et les larmes viennent, débordent et coulent en cascade.
Et elle s’excuse.
Elle me demande pardon de pleurer, de ne pas pouvoir se contenir. Je lui dis de ne pas s’excuser, qu’il vaut mieux que ça sorte.
Je lui dis que ses sentiments sont légitimes.
Je lui dis que ce n’est pas de sa faute.
Je ne lui dis pas que j’ai très envie de rencontrer certains membres de sa famille en face à face et de leur refaire le portrait à coup de pelle.
Il y a des émotions qui peuvent déborder, et d’autres non.
Même si parfois je me demande ce qui est le pire.
L’Autre dans le labyrinthe
Il ne faut pas que je dorme. Je vais juste m’asseoir un peu, là, dans ce coin, pour qu’il ne puisse pas me surprendre par derrière. Voilà. Surtout, ne pas m’adosser contre la paroi. Mon instinct me hurle de ne pas toucher cette roche noire inconnue, qui émet un bourdonnement presque imperceptible mais clairement menaçant. Malsain.
Les flaques ont toutes séché, à présent. La dernière que j’ai trouvée, je l’ai lapée jusqu’à la dernière goutte, comme un animal. S’il ne repleut pas bientôt, je suis foutu. Mais peut-être est-ce la pluie qui a effacé les marques que j’avais tracées par terre. Ou alors, c’est lui. Depuis le temps que j’arpente ce dédale en tous sens, j’aurais dû retomber sur un de mes repères. Sauf si le labyrinthe est immense. J’ai bien essayé de suivre toujours le même mur - pas moyen de me souvenir si ce doit être le gauche ou le droit, ou si ça n’a aucune importance -, sans succès. Si seulement j’avais eu un fil ! Mais ils m’ont ôté tous mes vêtements avant de me laisser ici, et je n’ai croisé aucune Ariane – je n’ai jamais tapé dans l’œil des filles, de toute façon.
J’ai soif. Comment survit-il, lui, quand il ne pleut pas pendant des jours et des jours ? Une petite voix dans ma tête me souffle que boire le sang des victimes qu’on lui amène à chaque nouvelle lune doit lui suffire. Je voudrais qu’elle se taise.
J’aurais dû, dès le début, quand j’en avais encore la force, lui faire face et l’attaquer. Peut-être que j’aurais eu une chance. Mais après cinq jours sans manger ni dormir, il ne faut plus y songer. C’est la terreur qui m’a retenu. Si je l’avais vu clairement, peut-être aurais-je trouvé le courage. Mais il se terre toujours dans l’ombre, et n’approche jamais suffisamment. Je ne suis parvenu qu’à distinguer vaguement sa silhouette. Aucune rumeur ne parlait de monstre dans le labyrinthe – mais est-ce un monstre ? Et comment se fier aux rumeurs quand personne n’est revenu d’ici ? La silhouette pourrait être celle d’un humain, en considérant qu’il se déplace sur les pieds et les mains, à la façon d’un grand singe. Et en considérant qu’il a été humain il y a longtemps, avant que les Dieux s’amusent à le déformer et à lui ajouter des excroissances avec autant de cruauté que d’imagination. Au bruit que j’entends parfois, je crois qu’il a des griffes, et qu’il les fait crisser contre la roche noire – pour les user ? les aiguiser ? ou juste jouer avec mes nerfs ? J’en suis réduit à deviner, et c’est pire que de l’avoir vu. Parce que, du coup, j’ai imaginé. Et ça m’a ôté toute velléité de l’affronter.
Ca, et le stupide espoir qu’ils m’ont chevillé au corps avant de me balancer dans le labyrinthe. Que si, pour une raison quelconque – qui peut prétendre connaître Leurs désirs et Leur logique ? – les Dieux jugeaient que j’avais plus de valeur vivant que mort, Ils renonceraient à mon sacrifice et me laisseraient sortir. Je me suis raccroché à cette infime possibilité – pourquoi ? Pourquoi, alors que je sais pertinemment que personne n’a jamais eu cette chance ? On l’aurait su. On l’aurait forcément su. Pas vrai ? Pourquoi ai-je cru, comme le dernier des imbéciles, que je pouvais être cette exception ? Eviter la confrontation avec l’Autre et me concentrer sur la recherche de la sortie m’a paru la meilleure option. Après tout, il ne m’attaque pas non plus. Il se contente de me suivre de loin. Mais maintenant la petite voix me répète en boucle que j’aurais dû tuer l’Autre pour prouver ma valeur aux Dieux. Je ne sais pas. Je ne sais plus. A moins qu’il ne soit lui-même un Dieu. A moins que les Dieux n’existent pas…
Il faut que je me remette en route. J’ai rouvert les paupières dans un sursaut – les ai-je fermées une seconde ? plus ? C’est trop dangereux de rester sans bouger. Combien de temps peut-on tenir éveillé ? Tôt ou tard, il va falloir que je dorme. Je le sais. Il le sait. L’Autre dans l’ombre attend son heure.
Jalousie
Il grandit en moi, ce sentiment qui m’empoisonne, qui m’asphyxie. Je le sens enfler, emplir toute ma cage thoracique, écraser mon cœur et mes poumons, tordre mon estomac.
Et je dis « Ah, c’est bien. »
J’ajoute « Tu as raison. Si tu es heureux, c’est le principal. »
Et aussi « Suis ton cœur. »
Le mien n’est déjà plus qu’un fantôme, de toute façon.
Une plante vénéneuse pousse en moi. C’est elle qui me torture. Son poison brûle mes veines à chaque fois que j’entends mon amour parler de son amour. Son amour pour une autre. Je souris. Je l’encourage. Il faut sourire. Il faut être gentille. Il ne m’appartient pas.
Mais il pourrait, murmure la plante.
Elle ajoute Pourquoi elle et pas toi ?
Et aussi Elle te le vole, ne te laisse pas faire.
Vilaine plante. Vilaines pensées. Vilain poison.
Je n’en peux plus.
Il ne voit rien. Et honnêtement, ça ne le concerne pas vraiment. C’est un combat entre moi et moi-même. Entre celle que je veux être et celle que je crains d’être. Entre celle qui avance toujours et celle qui va fracasser le crâne de sa rivale.
Je me retiens si fort.
J’étouffe.
« Je crois que ce serait mieux si on ne se voit plus pendant un certain temps. »
« C’est un peu compliqué à t’expliquer, mais crois-moi c’est mieux comme ça. »
« J’ai juste besoin d’un peu de temps pour moi. Pour souffler. Ne t’en fais pas, je te rappellerais dès que ça ira mieux. »
Dès que j’aurais arraché cette maudite plante et extirpé ses racines empoisonnées.
C’est ce qu’il y a de mieux à faire, n’est-ce pas ?
.
Mais j’étouffe. J’étouffe vraiment.
Si j’allais voir l’autre, la rivale qui ne sait pas qu’elle est la rivale, est-ce que ce serait si grave ?
Je ne lui veux pas de mal.
Pas vraiment.
Je veux juste respirer à nouveau.
C’est tout.
Effraction
« Viens, on peut entrer par là.
— T’es sûr ?
— Mais oui, fais pas ta poule mouillée, allez viens !
Ben a très envie de faire demi-tour, là tout de suite. La maison abandonnée est sinistre, et même si ce n’est pas eux qui cassé la fenêtre, c’est quand même une effraction. Il aurait dit non à n’importe qui.
Mais ce n’est pas n’importe qui qui lui demande, c’est Nathan, ils sont seuls tous les deux, ils sont partis à l’aventure, et Ben sait qu’il est prêt à faire n’importe quoi.
Pas de chance, n’importe quoi, c’est exactement le plan de son ami.
Ils entrent en se faufilant avec précaution par la vitre brisée, prenant garde à ne pas se couper sur le verre. À l’intérieur, une petite mare de boue, là où la pluie s’est mêlée à la saleté de la maison, et des tonnes de poussière. À peine arrivé, Ben se met à éternuer comme un perdu, sous les éclats de rire de Nathan.
— Bon, au moins les fantômes savent qu’on est arrivés maintenant…
Nathan le taquine, à la fois pour le bruit et pour sa peur des fantômes. Il a l’air ravi d’être ici. Ce qui laisse Ben un peu perplexe. C’est une horrible vieille maison abandonnée, dégoûtante et pleine d’araignées, voire de rats, et peut-être même hantée. Il n’y a rien d’amusant à y faire, à part passer de pièce en pièce en évitant de toucher les murs pour ne pas attraper le tétanos. Qu’est-ce qu’ils font là ?
Ils avancent. Il y a quelques tags, mais pas beaucoup. La maison n’a pas intéressé les squatteurs visiblement. Tout ce qui pouvait être intéressant a déjà été pillé, les objets restants, vieux et cassés, ont été jetés en vrac à droite et à gauche. Nathan fouine, essuie la poussière qui macule une vieille poupée au crâne fendu, la fait parler comme un mauvais ventriloque :
— Saluuut, Ben ! Je suis Jessica la poupée hantée, je suis te-lle-ment contente de te rencontrer ! Fais-moi un bisou !
Ben attrape le poignet de son ami et le débarrasse de la poupée avant que celui-ci ait pu la rapprocher. Ҫa n’a rien de difficile pour lui, il est beaucoup plus grand et plus fort que Nathan, au grand dam de celui-ci. C’est le plus petit des deux qui s’est révélé être un casse-cou intrépide. Qui se met toujours dans les ennuis. Qui aimerait tellement avoir la carrure de badass qui irait avec son caractère.
Mais il est mignon comme ça. Selon Ben, qui refuse de le lui dire. Ҫa serait… il n’a pas envie d’y réfléchir. C’est effrayant, c’est tout.
Presque aussi effrayant que cette maison, qui lui tape de plus en plus sur les nerfs.
Il sursaute en entendant un grincement et se retourne. Non, rien, bien sûr, mais son cœur bat la chamade et il commence à se sentir mal. Vivement la fin de…
— Hé, ça va ? demande Nathan.
Il a beau plaisanter sur les fantômes et tout le reste, Nath ne le pousserait pas jusqu’à ce qu’il ait vraiment peur. Ce n’est pas son genre.
— Ҫa va, ça v… Oh putain, là !
— Quoi, là ?
— Dans le miroir ! J’ai vu bouger !
— C’est rien, c’était sûrement les rideaux ou…
— J’ai vu bouger !
La voix de Ben s’est perchée dans les aigus tandis qu’il guette de tous les côtés à la recherche de l’ombre. Il ne l’a vue que du coin de l’œil, mais il l’a bien vue, sûr et certain ! Et les esprits ne s’en prennent pas aux sceptiques, c’est bien connu, alors c’est sans aucun doute lui qui va…
— Ben ! s’exclame Nathan en lui attrapant les deux bras. Ben, regarde-moi !
Ben commence à paniquer, il guette de tous les côtés la créature qui rôde sans doute, il sent son sang pulser jusque dans ses temps et sa vision s’étrécir. Nathan répète avec autorité :
— Ben, regarde-moi ! Parle-moi !
— Je… je te jure que…
— Oui, je sais que tu as vu quelque chose, et peut-être qu’on ne saura jamais vraiment ce que c’est, mais ce qui est sûr c’est que ce n’est pas dangereux. Il n’y a rien de dangereux ici. Jamais je ne t’aurais emmené dans un endroit dangereux, d’accord ?
— Tu…
— Tu as confiance en moi ?
— Ou… ouais…
— Regarde-moi. Comme ça, très bien. Respire lentement. Avec moi.
Ben préférerait guetter le fantôme qui se prépare à l’attaquer, mais il obéit à son ami, perdu dans son regard si intense, suit son rythme de respiration, et peu à peu s’apaise. Oui, il lui fait confiance, aveuglément.
Peu à peu ses sens reviennent à la normale. Son rythme cardiaque aussi. Il faut encore un temps avant que ses muscles ne finissent aussi par se décontracter, et enfin il lâche les bras de Nathan avec un petit sourire.
— Ҫa va mieux. Merc…
Il n’a pas le temps de finir. Nathan lui a attrapé la nuque et l’embrasse à pleine bouche.
Puis s’écarte.
Ils restent silencieux quelques instants, laissant l’évènement flotter entre eux, comme si en évitant de parler ils pouvaient encore décider si c’était vraiment arrivé ou non.
Puis Nathan soupire :
— Désolé… Je voulais faire un truc pour t’impressionner. Tu sais, genre le gars qui a peur de rien. Je pensais pas que tu flipperais vraiment. Pardon.
— Tu… t’as… quoi ?
— Tu t’y attendais vraiment pas ? Je pensais que tu le savais. Tout le monde le sait.
— Sait quoi ?
— Que je suis amoureux de toi. »
Ben ne le savait pas, non, il ne s’est jamais autorisé à l’imaginer, et il aura des millions de questions à poser – plus tard. Pour l’instant, il l’embrasse à nouveau, comme la réponse où il serait certain de ne pas se tromper à une question qu’il ne peut pas formuler.
La maison
Tous les enfants perdus finissent par trouver le chemin de cette maison. C’est le centre de gravité de la forêt – on a beau essayer d’avancer en ligne droite pour sortir, on ne fait que spiraler toujours plus près de cette maison-là. Enfin, pour les enfants perdus. Les adultes n’ont aucun mal à traverser les bois. C’est tout petit, en réalité. Même les chasseurs n’y trouvent aucun intérêt. Il n’y a pas le moindre champignon. On n’y croise que des promeneurs du dimanche, en famille, venus retrouver un peu de nature pour changer de leur quotidien citadin.
Pour les enfants perdus, la forêt est très différente. Plus grande. Plus sombre. Plus inquiétante. S’ils se mettent à courir, ils arrivent plus vite encore au centre. À la maison.
Non, ce n’est pas une maison en pain d’épice, ni une isba montée sur trois pattes de poule. C’est un pavillon tout ce qu’il y a de plus classique, fraichement repeint, avec un petit jardin propret, et une allée accueillante reliant la porte à un portail toujours ouvert. En pleine forêt, c’est tout. Sans trace de voiture ni de garage. Mais il y a un cheval, sur la pelouse à l’arrière de la maison, qui croque les pommes directement sur l’arbre, un grand cheval blanc. Ce serait un peu étrange, de vivre aussi loin de tout et de se déplacer à cheval, mais on vit une époque étrange et des tas de gens tentent des retours aux sources plus ou moins expérimentaux. Donc pourquoi pas.
De toute manière, après avoir erré dans les bois, avoir eu si peur et si faim, les enfants perdus ne se posent pas plus de questions. Ҫa fait des heures qu’ils ont vu que leur téléphone ne fonctionnait plus, et comment peut-on trouver des secours sans téléphone, à moins de demander à quelqu’un ? Et ils sont si soulagés de trouver une présence humaine à nouveau. Alors, ils hésitent, mais ils finissent toujours par prendre leur courage à deux mains et toquer à la porte.
L’accueil peut être différent. Parfois c’est une vieille femme souriante qui ouvre, parfois un grand homme costaud, parfois une jeune fille aux yeux perçants, parfois un autre enfant. Mais c’est toujours quelqu’un qui sait les rassurer immédiatement. Et tant mieux. Après tout, on ne devient pas un enfant perdu par hasard, en lâchant la main d’un de ses parents pendant la balade. Non, ces enfants-là ont déjà été perdus bien avant de mettre un pied dans la forêt. Perdus dans leur vie. À la recherche d’une place. À la recherche d’un sens, d’une identité qui leur correspondrait mieux que le masque qu’on leur force à arborer au quotidien. À la recherche d’eux-mêmes. À la recherche d’un abri, le temps de retrouver des forces, d’être prêt à affronter le monde.
Cette maison-là est un bon endroit pour ça.
Tous les enfants perdus finissent par repartir, tôt ou tard. Ils n’ont pas tous besoin du même temps. Certaines blessures sont longues à guérir, mais certaines révélations frappent comme la foudre. Chacun reste le temps qu’il lui faut. Ҫa ne change rien. Le chemin du retour est court, ils sont de retour dans le monde qu’ils ont quitté en un rien de temps. Un temps qui ne s’est pas écoulé pendant leur absence. Personne n’a même commencé à les chercher. Personne ne s’est rendu compte de rien.
Mais tout est différent à présent, et ils sont prêts à affronter le monde à nouveau.